Comprendre les troubles du neurodéveloppement à la lumière des avancées scientifiques

Les troubles du neurodéveloppement (TND) suscitent encore de nombreuses idées reçues. Trop souvent, des explications simplistes sont avancées : l’éducation, le temps d’écran, l’alimentation, ou encore un prétendu manque de stimulation. Pourtant, la science est aujourd’hui très claire sur ce point : il n’y a pas de trouble du neurodéveloppement sans susceptibilité génétique. Cela ne signifie pas que l’environnement n’a aucun rôle, mais il n’est jamais la cause première. Il ne déclenche un trouble que chez les personnes qui y sont biologiquement vulnérables.

Qu’est-ce qu’un trouble du neurodéveloppement ?

Les troubles du neurodéveloppement regroupent un ensemble de troubles qui affectent le développement du cerveau dès les premières étapes de la vie, et se manifestent souvent dès l’enfance. Selon le DSM-5 (American Psychiatric Association, 2013), ils incluent notamment :

  • Le trouble du spectre de l’autisme (TSA)

  • Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH)

  • Les troubles spécifiques des apprentissages (dyslexie, dyscalculie, etc.)

  • Le trouble du développement intellectuel

  • Les troubles de la communication

  • Les troubles moteurs développementaux, comme la dyspraxie

Ces troubles sont dits « développementaux » car ils apparaissent durant la période de développement du cerveau, souvent avant l’âge de 7 ans, et ont des répercussions durables sur le fonctionnement adaptatif, scolaire, social et familial de l’enfant.

🧬 Le rôle fondamental de la génétique

Les données scientifiques sont sans équivoque : les TND ont une base biologique et génétique forte. Des études de jumeaux, d’imagerie cérébrale et de génétique moléculaire ont permis de le démontrer.

➤ Études de jumeaux

Les recherches comparant des jumeaux monozygotes (identiques) et dizygotes (fraternels) ont montré que l’héritabilité du TDAH est estimée entre 70 et 80 % (Faraone et al., 2005 ; Larsson et al., 2014). Autrement dit, la majorité du risque d’avoir un TDAH s’explique par des facteurs génétiques.

Le TSA présente aussi une forte composante héréditaire, avec des études rapportant une héritabilité entre 50 et 90 % (Tick et al., 2016 ; Sandin et al., 2017).

➤ Gènes impliqués

Plusieurs gènes associés aux TND ont été identifiés. Ce ne sont pas des « gènes du trouble », mais des gènes de susceptibilité : ils augmentent la probabilité qu’un trouble émerge en interaction avec l’environnement. Des milliers de variantes génétiques de petite taille agissent de manière cumulative (modèle polygénique). Ce modèle est aujourd’hui largement reconnu par la recherche en neurosciences et génétique (Geschwind & State, 2015).

🌍 Le rôle de l’environnement : facteur modulateur, pas déclencheur

Il est fondamental de comprendre que l’environnement ne crée pas un TND, mais peut moduler la manière dont il s’exprime. C’est ce qu’on appelle le modèle vulnérabilité-stress : sans vulnérabilité génétique, l’environnement ne peut provoquer de trouble.

Ainsi :

  • Les écrans n’induisent pas un TDAH, mais peuvent aggraver l’inattention chez des enfants déjà vulnérables.

  • Une alimentation riche en sucre ne provoque pas un TND, même si certains enfants peuvent être plus sensibles aux variations glycémiques.

  • Un manque d’autorité parentale n’explique pas l’hyperactivité, et des parents aimants et compétents peuvent avoir un enfant présentant un TSA ou un TDAH.

👪 Culpabilisation des parents : une erreur persistante

De nombreux parents se sentent encore coupables, influencés par des discours non fondés, parfois véhiculés par des professionnels eux-mêmes mal informés. Or, les études les plus récentes confirment que les parents ne causent pas le trouble. En revanche, ils peuvent en améliorer ou aggraver la trajectoire en fonction du soutien qu’ils reçoivent et de la qualité de l’accompagnement.

L’INSERM et la Haute Autorité de Santé en France insistent d’ailleurs sur l’importance de l’intervention précoce et pluridisciplinaire, et déconstruisent les mythes liés à la parentalité ou à l’éducation comme cause.

🧩 Et les habiletés parentales dans tout ça ?

Si les habiletés parentales ne sont pas à l’origine des troubles du neurodéveloppement, elles peuvent toutefois moduler leur intensité au quotidien, ainsi que leur impact sur le développement affectif et comportemental de l’enfant. Un environnement éducatif sécurisant, structurant et bienveillant peut atténuer certaines manifestations du trouble, renforcer les capacités d’adaptation de l’enfant et limiter les risques de comorbidités (troubles anxieux, troubles de l’humeur, difficultés relationnelles…).

À l’inverse, une parentalité confrontée à un épuisement chronique, à des attentes irréalistes ou à des incompréhensions du fonctionnement atypique peut, sans le vouloir, accentuer les difficultés et entraîner un cercle de tensions, d’incompréhensions ou de sanctions inadaptées.

C’est pourquoi les programmes de guidance parentale (comme le Programme Barkley pour le TDAH, ou les interventions positives basées sur l’Approche neurodéveloppementale) ne visent pas à « corriger les parents », mais à les outiller, à renforcer leur sentiment de compétence, et à favoriser une alliance éducative alignée avec les besoins neurologiques spécifiques de leur enfant.

    ⚖️ Neurodéveloppemental ne veut pas dire fatalité

    Reconnaître la dimension neurodéveloppementale d’un trouble ne signifie pas se résigner, ni enfermer un enfant dans un diagnostic figé. Au contraire, cela ouvre la voie à une meilleure compréhension de ses besoins, et surtout à des interventions ciblées, efficaces et fondées sur la plasticité cérébrale.

    Le cerveau des enfants, même atypique, est malléable, en particulier dans les premières années de vie, mais aussi au-delà. Grâce à des approches adaptées – remédiation cognitive, outils psychoéducatifs, accompagnement émotionnel, pédagogie différenciée – il est possible d’aider ces enfants à développer des compétences, contourner des fragilités et s’épanouir selon leur propre trajectoire.

    📘 L’importance de la remédiation et de l’accompagnement psychoéducatif

    Aujourd’hui, l’accompagnement des enfants porteurs de TND ne se limite plus à un soutien scolaire ou à une simple surveillance. Il repose sur une approche globale, individualisée, fondée sur les données probantes et les principes de neuroéducation.

    La psychopédagogie spécialisée joue ici un rôle essentiel :

    • Elle aide à mieux comprendre son fonctionnement cognitif et émotionnel.

    • Elle propose des outils concrets pour mieux apprendre, s’organiser, se concentrer.

    • Elle soutient l’estime de soi, l’autonomie, la régulation émotionnelle.

    • Elle crée un pont entre l’enfant, sa famille et l’école, afin d’harmoniser les pratiques et de construire un environnement soutenant.

    Le mot d’ordre : adapter l’environnement à l’enfant, et non l’inverse.

    ✅ En résumé

    • Les TND ont une base génétique solide, attestée par la recherche.

    • L’environnement ne provoque pas les troubles, mais influence leur expression.

    • Les parents ne sont pas responsables du trouble, mais leur posture peut moduler son impact.

    • Un trouble neurodéveloppemental n’est pas une fatalité : une prise en charge adaptée permet à l’enfant d’évoluer, de progresser et de s’épanouir.

    • La psychopédagogie et les remédiations ciblées sont des leviers puissants pour accompagner les enfants de façon respectueuse et efficace.

    📎 Références scientifiques clés

    • Faraone, S.V. et al. (2005). The worldwide prevalence of ADHD: is it an American condition?. World Psychiatry

    • Larsson, H., et al. (2014). The heritability of clinically diagnosed ADHD across the lifespan. Psychological Medicine

    • Tick, B., et al. (2016). Heritability of autism spectrum disorders: a meta-analysis of twin studies. Journal of Child Psychology and Psychiatry

    • Sandin, S., et al. (2017). The Heritability of Autism Spectrum Disorder. JAMA

    • Geschwind, D.H., & State, M.W. (2015). Gene hunting in autism spectrum disorder: on the path to precision medicine. The Lancet Neurology

    • Shaw, P. et al. (2007). Attention-deficit/hyperactivity disorder is characterized by a delay in cortical maturation. PNAS

    • Courchesne, E. et al. (2011). Mapping early brain development in autism. Neuron

    Et si vous me laissiez vos coordonnées ?

    Vous seriez alors régulièrement (mais pas trop) informé(e) des prochains événements, articles de blogs, offres et toute autre activité de Au-Delà des Apparences. 

    Accompagnement

    Merci ! votre inscription a été prise en compte